à table
décembre 4, 2009
Dans la déroute qui disloque la bataille, vainqueurs et vaincus sont sur le même terrain. Course éperdue. Il fait nuit, il pleut. Un petit groupe de poursuivants se détache. Poisse, fatigue, vaine chasse, ils se sentent soudain très seuls, tout leur est contraire au fond de cette forêt. Les fuyards, quant à eux, reprennent haleine, ils sont chez eux, protégés par la nuit et par la pluie. Chez eux, ils y sont en effet. Des villageois en armes accourent, ils ont entendu dire que les leurs étaient pourchassés par le seigneur qui a mis le pays à sac. Ils encerclent la forêt, en réalité un bosquet de hêtres et d’épines. Au matin, chacun repart avec un morceau de viande à la ceinture. Le soleil se lève, on va pouvoir retourner aux champs.
Aurèle Jumilly de la Carpe, capitaine des Dragons, « Mémoires de campagne et champs de bataille », 1678